Les compagnies aériennes extra-européennes risquent de voir leur droit à desservir l’Union européenne (UE) révoqué si elles s’engagent dans des pratiques commerciales discriminatoires, selon la première version d’un projet adopté mardi dernier par la commission des Transports du Parlement européen.
Selon ce texte de loi, les pays membres et compagnies aériennes de l’UE pourraient porter plainte auprès de la Commission européenne s’ils s’estiment victimes de concurrence déloyale dans des pays ne faisant pas partie de l’UE ou s’ils jugent que des compagnies aériennes hors UE jouissent de subventions illicites. Egalement, les gouvernements européens pourraient imposer des « mesures compensatoires provisoires » à des compagnies de pays tiers avant même que ne soient connues les conclusions d’une éventuelle enquête, afin d’empêcher des dommages irréversibles.
« La pression exercée par des transporteurs de pays tiers largement subventionnés est de plus en plus sensible; elle peut saper une concurrence équitable sur le marché aux dépens des compagnies européennes«, a justifié Markus Pieper, le rapporteur du texte de loi. « Les transporteurs aériens de la région du Golfe, de Turquie, de Chine et de Russie ont des liens forts avec l’État qui peuvent causer des distorsions de marché. «
Des compagnies traditionelles telles qu’Air France-KLM et Lufthansa se plaignent depuis longtemps de la concurrence qu’elles jugent déloyale en particulier des compagnies du Golfe – Emirates, Etihad et Qatar Airways – auxquelles elles reprochent de bénéficier d’aides publiques illégales. Les trois grandes compagnies du Golfe, qui rejettent en bloc ces accusations, sont confrontées à une opposition de même nature aux Etats-Unis, qui a conduit le Qatar à accepter de publier des informations financières détaillées sur Qatar Airways à l’issue de discussions avec le gouvernement américain.
Le Parlement européen devra s’entendre avec les Etats membres sur une version définitive du texte avant qu’il prenne force de loi. Ce projet devrait donc être amendé au fil des discussions, et rien ne dit que le droit des dessertes ne soit pas amendé. En effet, certains pays de l’UE n’y sont pas totalement favorables : les droits de dessertes faisant habituellement d’accords bilatéraux, ils craignent de perdre à leur tour leurs dessertes aériennes dans les pays visés.
Des voyagistes, aussi, prennent la défense des compagnies du Golfe : « Une fois de plus, la puissance publique se porte au secours des compagnies aériennes, mais la pression économique qui est exercées par celles-ci, sur les agences de voyages n’est jamais évoquée. Nous sommes très contents de travailler avec des compagnies aériennes extra européennes, car elles nous offrent des conditions commerciales souvent meilleures que nos compagnies nationales aux comportements monopolistiques«, commente Fabrice Dariot, patron de l’agence Bourse-des-vols.com. (Air Journal, photo : Alina Zienowicz)