Electronique en cabine vers les USA : tous les vols internationaux concernés ?

L’administration américaine se dit prête à étendre l’interdiction en cabine de tout appareil électronique plus gros qu’un smartphone à tous les vols internationaux vers les Etats-Unis, citant une « menace réelle ».

Alors que de nouvelles discussions avec la Commission européenne sont prévues cette semaine, le secrétaire au département de la sécurité intérieure (DHS) John Kelly a déclaré le 28 mai 2017 sur Fox News que la menace d’un terroriste transportant une bombe cachée dans un appareil électronique est réelle.  « C’est vraiment l’obsession des terroristes : abattre un avion en vol, particulièrement un avion américain, bondé d’Américains à bord », a-t-il affirmé. Les autorités sont donc prêtes à interdire sur tous les vols internationaux à destination des Etats-Unis les ordinateurs portables, tablettes, liseuses ou consoles de jeu « qui sont désormais devenus de véritables armes de destruction massive » selon les « informations sérieuses de la CIA ». Ces terroristes voudraient utiliser « tout ce qu’il est encore possible d’emporter à bord d’un avion », a-t-il ajouté. On rappellera que l’explosion à bord d’un avion de Daallo Airlines en Somalie, en février 2016, avait été causé par une bombe cachée dans un ordinateur portable ; seul le terroriste avait trouvé la mort dans l’incident.

Déjà depuis le début du mois, la possibilité d’étendre à l’Europe une mesure jusque là réservée à neuf compagnies aériennes partant de dix aéroports dans des pays majoritairement musulmans provoque l’émoi : l’axe transatlantique est le plus chargé au monde avec près de 3700 vols par semaine selon ACI Europe. Le PDG de l’IATA Alexandre de Juniac expliquait que le placement forcé en soute des appareils électroniques « pourrait coûter 1,1 milliard de dollars par an aux passagers, affecter l’économie, impacter les opérations des compagnies aériennes et créer un risque supplémentaire d’incendie des batteries au lithium-ion » utilisées dans l’électronique (la somme citée est censée représenter la perte de productivité dans les airs pour les voyageurs d’affaires, ainsi que le temps perdu par des vols plus longs). Le San José Mercury News a de son côté que le coût de cette mesure pourrait dépasser les 100 millions de dollars par mois ; elle entrainerait une baisse de 6 à 15% des voyages vers les USA.

Les principales compagnies européennes concernées, Air France-KLM, British Airways et le groupe Lufthansa, auraient déjà mis en place des scénarios pour répondre instantanément à la mise en place d’une telle interdiction, qui pour la première fois affecterait aussi les passagers d’American Airlines, Delta Air Lines et United Airlines. Plusieurs compagnies aériennes ont tenté de contourner la mesure en prêtant des ordinateurs portables aux passagers de Première ou de classe Affaires, comme par exemple Qatar Airways, Turkish Airlines ou Emirates Airlines, mais cette dernière a fini par réduire la voilure en direction des Etats-Unis.

Rappelons que la mesure confirmée le 21 mars dernier par Washington, et qui est censée durer jusqu’à octobre, concerne à ce jour neuf compagnies aériennes : Egyptair, Emirates Airlines, Etihad Airways, Kuwait Airways, Qatar Airways, Royal Air Maroc, Royal Jordanian Airlines, Saudia et Turkish Airlines, et tous les vols directs en provenance de dix aéroports : Abou Dhabi, Amman, Le Caire, Casablanca, Djeddah, Doha, Dubaï, Istanbul, le Koweït et Ryad. Le gouvernement britannique avait adopté dans la foulée une mesure similaire visant six pays (la Turquie, l’Egypte, la Jordanie et l’Arabie Saoudite comme aux USA, mais aussi la Tunisie et le Liban) et affectant les opérations de quatorze compagnies  aériennes : British Airways, easyJet, Jet2.com, Monarch Airlines, Thomas Cook Airlines, Thomson Airways et depuis l’étranger Turkish Airlines, Pegasus Airlines, AtlasGlobal Airlines, Middle East Airlines, Egyptair, Royal Jordanian Airlines, Tunisair et Saudia.

Mais ni les Etats-Unis ni la Grande Bretagne n’ont expliqué pourquoi le transport en soute d’appareils équipés de batterie au lithium-ion était plus sûr qu’en cabine, et l’Agence européenne de la sécurité aérienne a émis des réserves. Selon The Daily Beast qui cite un rapport interne de la FAA, au moins 33 incidents liés à des appareils électroniques transportés en cabine se sont produits en 2016 sur le seul territoire américain (dont trois dans des laptops et deux dans des tablettes), le plus grave provoquant un dégagement de fumée tel que les passagers d’un vol Delta ont ouvert les portes de secours et sont sortis sur les ailes à l’arrivée à Atlanta le 15 janvier. Des tests menés en 2015 par la FAA avaient d’ailleurs démontré que le système anti-incendie en soute des avions était insuffisant pour éteindre un feu déclenché par des batteries au lithium – d’où justement l’interdiction de ces appareils électronique en soute. (Air Journal)